Nous avions promis à Skol de ne pas attendre que la mousse lui pousse au pied du mât pour reprendre la mer. Voilà. Exactement cinq mois après notre arrivé à Chiloé. Pourquoi si longtemps ? demandait l'ami Karel. Pourquoi si peu ? demandent nos amis Chilotes. Qu'est-ce qui fait qu'une escale est trop longue ou pas assez ? Pourquoi pas juste bien ? Je suis en paix avec cette durée-là, elle a été bien remplie ! Travaux d'isolation urgents, voyage en France, développement de liens amicaux et puis l'accueil des visiteurs et les réflexions sur la suite de notre vie de voyage. Non, nous ne nous sommes pas laissé endormir par le confort de la vie de ponton !
Notre route serpente entre les îles de l'archipel de Chiloé qui font jouer les vents et les courants de manière parfois imprévisible. Dans un tel dédale, il est toujours difficile de comprendre par où circulera l'eau des marées et à quelle heure le courant s'inversera. Je joue à faire des prédictions, qui font souvent sourire Ariel. Il dit ensuite que j'ai de la chance, quand la renverse que j'espérais favorable se produit justement au moment où nous passons l'endroit critique. Moi je prétends que ce n'est pas uniquement de la chance (1). Chaque île modifie le vent à sa manière, en fonction de son relief et de la température du sol. Nous jonglons avec les éléments. Intelligence du terrain acquise par des années de pratique en Bretagne et plaisir que procurent les habitudes bien huilées de communication et de manœuvre. Ce bord n'est pas bon, on essaie de l'autre côté pour voir ce que ça donne ? La mousse n'a pas poussé au pied du mât de Skol et nos réflexes nautiques n'ont pas pris la rouille.
Du soleil, des vents favorables et doux, un air transparent. On se croit par moment transportés au japon tant les volcans d’ici se donnent des airs de Mont Fuji en jouant à cache-cache avec les îles. Nous atteignons Puerto Montt en quelques jours tranquilles. Comme toujours après une longue période au ponton, l’intensité de la vie en mer nous reprend, ces quelques jours donnent l’impression de durer deux semaines.
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Ma propre mère n'a t-elle pas été couronnée « reine des courants », en quatre colonnes à la une d'un journal breton qui célébrait sa victoire dans une série de régates ? J'ai peut-être un peu de son instinct dans les veines…
Ola Skol,
Je ne sais pourquoi vos textes et vos photos me touchent si intimement... peut-être, sans doute une part de moi avait faim de vos aventures mais surtout désir de tracer les mots justes et révéler les images rares mais sensibles. Je crois aussi que le rêve réalisé me touche profondément, il appelle une tristesse en moi : celle de ne pas savoir quel est mon "propre" rêve. Je suis convaincu que l'être humain est mis en mouvement par désir mimétique. Je suis convaincu que nous n'avons de désir que par l'entremise d'autrui, cela devient problématique individuellement quand les tuteurs n'en sont pas si vous me permettez l'analogie avec les arbres...
Continuez votre belle aventure avec la même sincérité du coeur. Merci pour votre inspiration et la beauté qui traverse votre blog et votre vie. Avec toute ma gratitude. Laurent
Rédigé par : Laurent Fournier | 08 janvier 2017 à 11:36
Holà Petit Trimaran Jaune,
Merci à toi pour ce beau message.
Le rêve réalisé a déclenché aussi une tristesse en nous. Une sorte de vide, d’abîme, d’interrogation … et maintenant, quoi ?
Ca reste un tâtonnement, entre nos désirs et la réalité concrète, brute. Tâtonnement qui se retrouve dans notre écriture.
Bonne année 2017
Isabelle
Rédigé par : Isabelle | 13 janvier 2017 à 22:20