J'aime l'allure tranquille des voiliers qui ont de la bouteille. J'aime trainer sur les quais quand ils sortent du port, parfois en flotille, j'aime changer de cap pour m'en rapprocher quand nous en croisons un en mer. Je rêve souvent d'un court séjour à bord de l'un d'eux et j'ai eu ce plaisir, partagé avec ma fille, aux Açores il y a trois ans, à la grande surprise d'Ariel qui ne comprenait pas qu'après avoir traversé un demi-océan, j'aie encore envie de naviguer, encore et tout de suite, au lieu de me rassasier de terre. Oui mais c'est pas pareil, tu vois ? Ces Botes Baleiros, c'est spécial: ça va vite, ça file à 12 noeuds à ras de l'eau, et tu t'imagines autrefois quand ça danse dans la vague.
Ariel, lui, en respecte profondément l'histoire, marquée de l'effort, des peines et misères souvent effroyables qui jalonnaient la vie des marins d'autrefois.
Nous sommes donc deux à partager ce petit plaisir, deux à être d'accord pour interrompre nos activités en cours, lorsqu'une voile brune ou un gréement à l'ancienne croise à proximité, chercher l'appareil photo, nous rapprocher du beau bateau sans le déranger, contempler ses virements de bord (qui peuvent devenir fort complexes pour un grand voilier lourd et peu manoeuvrant), et admirer la manière dont il exploite le terrain, parce que le barreur connait par coeur son bateau, la rive et les courants.
Quelques unes de nos rencontres sont rassemblées dans la galerie Beaux Gréements. Ce sont toutes des rencontres de hasard, car nous n'allons jamais délibérement aux rendez-vous de "vieux gréements". L'abondance intentionnelle gâcherait un peu le charme, nous semble-t'il.