Le jurançon est, paraît-il, un vin de longue garde et qui voyage bien. Et c’est un bateau conçu pour le voyage. Pour le grand voyage, comme on dit. Notre choix, il y a sept ans, d’acheter ce type de voilier, robuste, rassurant, plutôt qu’un plus petit, plus maniable ou fait d’un autre matériau, bois ou plastique, n’était pas innocent. Notre voilier devait pouvoir, le cas échéant, si la vie nous rendait ce rêve un jour possible, nous emmener loin, loin au-delà de notre terrain de jeu habituel[1]. C’était un élément essentiel de notre histoire d’amour, ce possible voyage à l’horizon, comme une promesse. Nous avons l’habitude de raconter que nous nous sommes mutuellement demandés en voyage, peu de temps après notre rencontre.
Depuis que nous avons acheté Skol, donc, chaque modification qui lui a été apportée et chaque équipement que nous avons ajouté à son inventaire devaient êtres compatibles avec ce potentiel projet. Certaines de nos navigations d’été avaient également ce caractère préparatoire. Il y a eu notamment le voyage vers les Açores, au milieu de l’Atlantique, pour vérifier notre aptitude à la navigation hauturière et le voyage vers le Cercle Polaire pour vérifier notre résistance aux conditions climatiques dures et à la topographie exigeante des hautes latitudes.
Et puis, et puis... une série de circonstances[2], au fil des années, a progressivement précisé les choses. Pour tout un tas de raisons, après d’interminables discussions à propos des raisons du voyage, à propos des destinations du voyage, à propos des modalités, à propos des risques et des enjeux, nous avons décidé. C’est pour bientôt, inch’allah ! Décision de partir en itinérance, décision de mettre le rêve en actes, malgré les craintes, nombreuses, malgré les difficultés, réelles. La gamme de nos interrogations bascule de « quand partirons-nous ? » à « sommes-nous prêts à partir ? ». Prêts à vivre ensemble à bord à plein temps ? Prêts à travailler en itinérance ? Prêts à nous éloigner de nos familles et amis ? Prêts à renoncer aux filets de sécurité de notre société protectrice ? Et jusqu’où pousser la préparation du bateau ?
Ce blog se voulant poético-méditatif, vous n’y lirez pas (ou très peu) de narration technique de nos préparatifs. En revanche, chacun des grands registres de la préparation sera abordé dans les mois qui viennent, à notre manière, plus réflexive que descriptive et plus interrogative que précise.
Est-ce qu’on mesure bien dans quoi on s’engage quand on prend ce genre de décision ?
[1] Le terrain que nous fréquentions chacun de notre coté avant de nous rencontrer et que nous avons fréquenté ensemble depuis, un espace accessible aux navigations estivales, qui va de l’Espagne au nord de l’Europe, et de la mer Baltique aux Açores.
[2] Circonstances privées, professionnelles, familiales, politiques, sociétales.
Isa, quand on a la passion de la mer et du voyage et que l'on a une opportunité de partir sans casser sa famille, le pire c'est peut-être de ne pas le tenter... Le boulot c'est rien de perdu de tte façon, mais ça on le comprend un peu tard.. La vraie vie de mer, ça c'est vraiment quelque chose, et en restant terrien (forcé) est-ce que nous ne gaspillons pas du temps pour cette vraie vie ?
Rédigé par : Fabien | 11 novembre 2013 à 22:45
Hello Fabien,
La "vraie vie"...humm... une expression ambivalente, que nous n'utilisons pas, en fait. Pour certains, la vie de mer est une vie à l'écart, en retrait du monde, en retrait de la "vraie vie" sociale. Pour d'autres, la vie en mer est une vie plus proche du cosmos et des éléments, plus proche de la "vraie nature de l'homme". Ha! L'un est-il plus vrai que l'autre? On reviendra peut-être là dessus dans une note ultérieure.
Quand à ne pas casser la famille, à moins de ne pas en avoir du tout (ce qui n'est pas notre cas) ou de partir avec tout le monde (et ça peut faire beaucoup, selon le périmètre de la famille), il me semble impossible de ne pas casser quelque chose. La distance va changer quelque chose. Inéluctablement. Au minimum : casser le rythme auquel on embrasse ses parents et ses enfants. Casser la possibilité d'être en soutien auprès d'eux en quelques heures en cas de pépin. Ca aussi, on pourrait en reparler.
Je te souhaite de belles cogitations de ton coté, ça semble te travailler....
Aurais-tu, toi, un projet enfoui quelque part?
Rédigé par : Isabelle | 13 novembre 2013 à 18:22
Bonjour Isabelle & Ariel,
Merci de partager vos aventures et émotions, on s'y croirait ! J'ai une petite question, pour le moment, je ne suis encore qu'en préparation de mon projet TDM (mikeno.fr) qui devrait débuter en juin/juillet 2020, comme beaucoup d'autres, la Patagonie et la Terre de Feu m'attirent particulièrement et comme vous connaissez, j'aimerai savoir ce que vous pensez de mon idée de parcours dans cette région (voir https://www.google.be/maps/@-54.2565223,-69.6115341,531505m/data=!3m1!1e3!4m2!6m1!1s1z0v0Buuyb_7I1f4GQTzx2puEanQ).
Merci d'avance
Bon vent & bonne mer !
Philippe de Mikeno
Rédigé par : Philippe Lagarrigue | 05 juin 2018 à 14:25