Le lecteur habituel de ce blog a compris que nous tentons de nous distinguer, dans notre façon de vivre en itinérance, de la grande masse des voyageurs en voilier, une variété de voyageurs qui se montrent souvent un peu trop pris par les soucis de leur bateau et la barrière de la langue pour vraiment sortir de l'entre-soi des voileux. Nous n'y parvenons pas toujours mais notre style de vie devrait au moins nous protéger plus aisément encore de l'assimilation à une autre catégorie de voyageurs, celle des « touristes ». Ceux-là sont bien souvent piégés par le temps de leurs vacances de travailleurs et par conséquent contraints de faire semblant de croire que payer pour des prestations calibrées leur donnera accès à l'aventure, la vraie ou à l'âme d'un peuple, authentique. Le « Skol way » ne mange pas de ce pain-là, n'est-ce pas ?
Et pourtant, et pourtant, quiconque nous observait sur la « Carretera Austral » dans le courant du mois de novembre pouvait légitimement penser que nous en étions. Des touristes ! Voiture de location, avalage de kilomètres avec pauses-photo, changement de gite toutes les nuits ou presque et recours à un guide professionnel qui nous a fourni beaucoup plus d'informations que ce que nous attendions sur la faune et la flore de la vallée du Rio Tranquilo. On a même docilement passé les gilets de sauvetage pour l'excursion nautique. C'est dire.
Oui, mais on avait une excuse en béton ! La maman et le cousin d'Ariel étaient en visite et mon homme voulait leur montrer quelques beautés particulières de la nature. Des beautés auxquelles nous aurions pu accéder en bateau, en prenant pour cela beaucoup, beaucoup plus de temps que nos visiteurs n'en disposaient, outre le fait que vivre à quatre dans un Skol n'ayant pas de cabines privatives et déjà chargé à toc de toutes nos petites affaires n'aurait pas été aisé. Sans compter que la météo n'avait pas annoncé à l'avance qu'elle serait clémente-garantie-sur-et-certain-parfaite-pour-des-novices. Bref, en bon fils dévoué, Ariel a préféré assurer. Nous nous sommes donc engagés dans un road trip de dix jours, le croirez-vous ?
Cela dit, amis lecteurs, soyez rassurés ! Nous n'avons pas totalement perdu notre âme ni renoncé à notre bien-vivre Skolien, même pour quelques jours. Mister Kefir est resté à bord mais le levain et le sac de farine nous ont accompagnés pour produire le pain quotidien. Le coffre de la voiture contenait un « fond de cuisine » très décent pour assurer la préparation des petits festins familiaux, le soir au coin du poêle. Nous n'avons pas non plus résisté à notre penchant pour le questionnement socio-politique des locaux. Le même guide qui nous parlait des montagnes et des rivières a révélé être également biologiste dans un laboratoire d'analyse dédié à l'aquaculture et s'est retrouvé embarqué dans un grand débat sur la viabilité de l'élevage des saumons auquel il ne s'attendait pas. Et surtout nous avons sagement limité les objectifs de « consommation touristique » pour bien savourer chaque moment.
A suivre…
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