La prévision météo est un exercice complexe et imprécis, qui se dégrade a mesure que le climat se détraque et que les psychopathes jouent à démanteler la NOAA. On avait vu déjà pendant le COVID à quel point la privation de données, conséquence de l’absence d'avions en vol pour les capter, pouvait handicaper l’exercice. On le voit de nouveau et encore plus depuis quelques mois.
La pluie est particulièrement difficile à pronostiquer, car il suffit de quelques degrés d’écart de température ou de quelques hectopascals de pression pour que là-haut ça condense plus ou moins, ou pas du tout. Alors , avec moins de données, on a encore moins de visibilité.
En mer, je me moquais de la pluie, sauf pendant les longues traversées, lorsque les réserves d’eau douce étaient insuffisantes pour aller au bout. La pluie, lorsque les réservoirs étaient pleins, n’étaient qu’un facteur de confort ou d’inconfort. Seul le vent comptait vraiment. Au vent, nous accordions une attention permanente. Force et direction. Stabilité ou rafales. Dans les passages de fronts et grains, c’était le changement du vent qui nous faisait agir. Réduire ou redéployer la toile. Régler l’allure.
Désormais, dans ma vie de néopaysanne, c’est le vent qui est devenu secondaire et la pluie décisive. Certaines opération agricoles doivent être faites avant une pluie : la préparation du sol et la plupart des semis. D’autres sont plus pertinents à faire après la pluie : le désherbage, la pose des bâches d’occultation, la plantation des poireaux et les semi de haricots. Quand il fait sec pendant longtemps, c’est l’irrigation qu’il faut déclencher, faire tourner d’une parcelle à l’autre, pour les cultures qui en ont besoin. Pendant les saisons « sèches », consulter la météo est ma première action du matin, avant même de sortir du lit. Et quand je vois la moindre précipitation annoncée, je reconsulte plusieurs fois par jour à travers plusieurs sites, pour tenter de comprendre la solidité de la prévision. Car parfois, l’annonce de la pluie pour dans 4 ou 5 jours s’amenuise a mesure que la date approche.
J’écris ces lignes en écoutant le doux clapotis d’une fine pluie bretonne, délicieuse, accueillie avec joie et d’autant plus savourée que tout a été fait pour préparer le jardin à la recevoir. Un épisode annoncé de plus de vingt milimètres, que j’ai transformé en grande accélération des récoltes dès que j’ai compris que c’était sérieux. Trois journées ont été intensément consacrées à mettre les oignons, les échalotes et l’ail, les lentilles et le lin, les pois et pois chiches à l’abri dans la grange, et à préparer dans la foulée le sol pour y semer le sarrasin et la phacélie qui prendront le relai de la conversation entre le ciel et la vie du sol.
Mention particulière à mes cohabitant-e-s qui ont répondu à l’appel du cosmos et se sont relayé-e-s à mes cotés pendant trois jours pour que le travail que je ne pouvais pas faire seule soit fait quand même jusqu’au bout. Je crois que j’ai réussi à transmettre quelque chose. Peut-être l’évidence de obéissance au ciel.
Le cycle a été accompli et commenté une fois de plus. Apprentissage. Le séchoir est plein, les pesées ont commencé. C’est moins généreux que l’an dernier, à cause du manque d’eau du printemps. Chacun chacune peut questionner et comparer. Nous avons mis à l’abri ce qu’il y avait, quoi qu’il y ait eu au champ. C’est bien.
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