Alors que nous prenons le soleil dans le cockpit, au mouillage dans l'anse de Ster-Vraz, un étrange objet flottant s'approche de nous. Une forme rectangulaire tout à fait improbable à cet endroit, sur la côte dite "sauvage" de Belle-Ile. Son architecture en loft parisien avec baie vitrée face à la mer, avec blacon, nous semble un contresens marin : la dite baie vitrée est orientée vers l'avant du bateau !
Cet engin est la résidence secondaire d'une petite famille sympathique qui étudie la météo soigneusement avant toute expédition en eaux libres, en eaux exposées à la houle et aux vents. Et de fait, il n'y a pas de houle ces-jours-ci, après plusieurs jours de grand calme. Ils ont construit leur bateau tout seuls, tel qu'ils le rêvaient, avant que les enfants arrivent dans leur vie. A l'intérieur, disent-ils*, c'est un peu comme un loft, avec un grand espace à vivre et de petites cabines. Les flotteurs ne servent qu'au stockage (eau, carburant, etc.). Ils ont traversé la Manche, une année, et sont allés jusqu'aux Scilly. Ils racontent que dans la mer formée le bateau est stable, la cabine est suffisamment en hauteur pour que la navigation ne soit pas gènée. Et en cas de tempête ? ils coupent le moteur et attendent que ça passe !
Voilà donc un bel exemple de la philosophie d'accès à la mer fondée sur la responsabilité du marin. C'est à celui qui prend la mer d'évaluer si les conditions présentes et prévues lui permettent d'envisager de s'éloigner des côtes. Comme, visiblement, cela fait plusieurs années que leur aventure fonctionne, on peut imaginer qu'ils ont trouvé de bons critères pour prendre la mer avec ce bateau-là.
* Propos recueillis par Hélène, dont le gout pour la nage en eau froide a permis cette courte interview, tandis que les skippers, imperturbablement, poursuivaient leur enchainement de TaChi-Chuan sur la plage. (Merci)