Yann ayant bien voulu me montrer sa façon d’établir un plan de culture annuel, je suis actuellement en plein cœur des travaux pratiques, avec deux groupes, pour deux sites (1 et 2). Nous jonglons avec des stocks de semences approximatifs, des besoins assez souples, et des disponibilités en main d’œuvre incertaines, mais la mécanique d’élaboration du plan de culture spatial puis sa traduction en calendrier fonctionne bien, une étape après l’autre.
Réfléchir à chaque parcelle, son état, son potentiel, lui affecter une culture destinée à la vie du sol ou destinée aux humains, choisir les espèces et variétés, noter le parcours cultural, la densité, estimer la production, allouer des surfaces. Puis reprendre toutes les données en les réorganisant dans le temps, début, milieu ou fin de mois. Semis, rempotages, repiquages. Vérifier les mouvement des bâches, affiner les détails de gestes à prévoir ou de petit matériel à acquérir et installer, estimer et lisser la charge de travail, ou au contraire la concentrer en « chantiers collectifs ». Il faut parfois renoncer à une culture attractive mais trop exigeante pour le moment ou bien laisser en paix une parcelle dont le sol n’est pas encore prêt. Il faut parfois expliquer plusieurs fois certaines particularités des plantes. Il faut parfois rechercher dans mes carnets ou dans les ouvrages des points de détail qui m’ont échappé. Je mesure alors, à mon aisance à m’y retrouver dans les données techniques, combien mon socle de savoirs s’est déjà étoffé, en guère plus d’un an.
Il s’agit de prévoir dès maintenant l’année 2021 entière et même plus, car les cultures alimentaires courront de mars 2021 pour les premiers semis à avril 2022 pour les dernières récoltes. Quand à eux, les couverts végétaux et les rotations entre parcelles doivent être envisagés à la louche sur 18 ou 24 mois pour assurer qu’on retombera sur nos pattes.
Voilà, ça sera dans mon histoire pour les temps à venir, chaque année, pendant l’hiver : planifier la nourriture de l’an prochain, celle des humains et celle des vers de terre ! Je ne sais si le meilleur c’est d’avoir la possibilité de faire tout cela calmement au bon moment, ou si c’est de le faire en collectif, en partageant les décisions, et en outre, sans pression du résultat car mon état d’apprentie est connue de toustes. Les trois, sans doute ?
- Dans le limousin, au sein d’un collectif de vie en cours d’assemblage, je pilote, depuis le printemps dernier, la mise place d’un semi-maraichage. Une première parcelle de 8x16 a été semée en sarrasin, pendant qu’un potager amateur servait de terrain d’apprentissage et de première production alimentaire, copieuse pour l’été et un peu plus symbolique pour l’hiver. Pendant l’été 4 nouvelles parcelles ont été marquées dans une zone de prairie et un programme de remise en vie du sol est dessiné pour chacune d’entre elles. Bâchage, dépose d broyat, ensemencement, diverses approches sont en test. Plus récemment, deux parcelles de plus ont été marquées et bâchées, dans d’autres prairies du vaste terrain, pour explorer la réponse des sols qui semblent différents. Le plan de culture comporte donc 7 parcelles totalisant 1200m2, plus le potager qui servira encore de terrain d’expérimentation et de petite production. Bien entendu, à ce stade précoce, la plupart des parcelles sont bâchées ou cultivées en couvert végétal, mais la première production ample d’oignons devrait démarrer en mars et la production estivale de pommes de terres, courges et haricots secs va être plus que triplée en 2021 par rapport à 2022. N’ayant pas (encore ?) choisi de résider sur place, je m’assure de démarrer en grand volume seulement ces productions simples, qui nécessitent peu de soin par les membres du collectif résidant déjà sur place. Le plan de culture est donc assez simple à établir et à partager avec le groupe.
- En Bretagne, au sein d’une association de citoyens actifs décidés à apprendre et produire ensemble, je contribue à la mise en place d’un grand potager collectif. Cette année, la première, il est visé 250m2 sous forme de planches potagères de 20m2 réparties en blocs. On part d’une prairie riche et souple, avec une tentative de produire du légume sur presque toutes les planches dès la première année. Pari audacieux. Un tiers des planches ont été amendées de tonte, paille, broyat et sont donc légèrement « buttées », un tiers sont simplement bâchées pour le moment, et un tiers sera cultivé direct sur prairie pendant l’été, sous paille épaisse (pommes de terre) ou sous bâche tissée (courges). Dans ce projet breton, comme la proximité des nombreux participants le permet, le plan de culture prévoit une large variété de légumes avec une vraie production hivernale. Il est donc relativement complexe, comportant dès le début pratiquement toutes les opérations annuelles d’un maraichage, mais à échelle réduite.
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