Le premier groupe est composé des cultures qu’on installe entre novembre et mars, et qu’on récolte au printemps ou pendant l’été. J’aime beaucoup ce groupe car il occupe le sol utilement pendant la saison froide et profite bien des pluies hivernales, sans besoin d’irrigation. Dans ce groupe, on trouve mes céréales et légumineuses d’hiver, et le trio ail, oignon, patates précoces du collectif. Ayant compris tardivement que les lentilles et les pois chiches n’avaient pas besoin d’un sol chaud pour germer, je les ai semés dans ce premier groupe, alors que les années précédentes je les considérais comme des cultures d’été à ne pas semer avant le printemps. J’ai donc peut-être à mon panel quatre légumineuses (fèves, pois, lentilles, pois chiches) en capacité de profiter des pluies d’hiver et de printemps, ce qui serait très rassurant pour l’avenir.
Comme le sol a été travaillé seulement début mars, la fenêtre de semi a été plus réduite, et il y a des choses que je n’ai pas pu semer (le seigle et l’ail blanc par exemple) mais par chance cette année, cela s’est avéré un avantage car, en raison d’un hiver excessivement pluvieux, beaucoup de cultures installées en novembre ont vraiment souffert.
Voilà donc ce qu'il y a au champs actuellement (200m2) :
- du Blé : 50 m² de blé population FURAT, que j’ai semé comme « blé de printemps » sans savoir si cela lui conviendrait. A généreusement tallé malgré ce semi tardif et se trouve en meilleur état que celui semé par mes amis du réseau de test de cette population, qui ont pu semer en novembre ou décembre. Il est très haut, conséquence probablement du retournement de la prairie qui a dû libérer beaucoup d’azote. Culminant à 1m50 et la majorité au dessus de 1m20, ça fait de la belle paille en perspective, mais une petite préoccupation en cas de grosses pluies venteuses avant la récolte. Il pourrait verser avant la maturation du grain. A suivre.
- de la moutarde : 30 m² de moutarde blanche, la première fois que je réussis à produire de la moutarde, youpee. Elle arrive bientôt à maturité, un peu pus tard que les cultures conventionnelles dans les champs alentours, qui ont dû être semées plus tôt. Tant mieux, leur récolte me fera un signal pour déclencher la mienne, car en vrai je ne sais pas encore quand il faut récolter ! Je suis déjà en train de réfléchir à l’espace à préparer pour le séchage entre récolte et battage. Sans doute une suspension de draps tendus sur les bambous, sous les poutres de la grange. Ça va être intéressant, et même amusant, de commencer à fabriquer « la moutarde du Heder ».
- 20 m² d’orge qui une fois de plus s’est fait piller par les oiseaux. Il est si clairsemé que la récolte manuelle épi par épi s’imposera, mais j’en aurai sans doute plus que l’an dernier. Si ce n’est pas une vraie multiplication, au moins je préserve et j’adapte en commençant à comprendre ses besoins (à mon avis un paillage plus épais pour le protéger des oiseaux). Il est assez encombré de chardons qu’il faudra arracher avant ou après la récolte … avec une bonne protection des mains et des bras !
- trois rangs touffus de fèves dont la floraison a souffert de pluies printanières un peu trop quotidienne, qui ont gêné le travail des pollinisateurs. Pour cette raison, parce que les pieds portaient peu de gousses chacun, je n’ai pas récolté pour la consommation en frais. La dernière floraison permettra peut-être une petite récolte en frais, mais sinon c’est pas grave, il y aura de toutes façons assez de production pour la semences et même à mon avis beaucoup trop, ce qui permettra de mettre l’excédent en cuisine en sec. La hauteur des pieds de fève est surprenante par rapport à ce à quoi j’étais habituée, la plus haute mesure 1m65, sans le moindre apport d’engrais et en extérieur ! J’attribue la vigueur générale de cette population aux métissages qui se sont probablement produits les deux saisons précédentes, où je les cultivais déjà en multivariété et grande promiscuité. J’ai hâte de voir quel sera le mix des couleurs et formes lors de l’écossage.
- dans les fèves, 3mètres linéaires de pois variés. C’est la première fois que je cultive vraiment les pois, et leur beauté, leur port gracieux, leur floraison multicolore et les gousses vertes, jaunes, violettes, me procurent des bouffées de joies à chaque fois que je les contemple. L’intégralité de cette modeste production sera réservée pour les semis de l’an prochain, qui du coup seront assez copieux, j’espère, pour fournir de quoi manger, tout en continuant à hybrider. La poignée de mélange que j’ai troquée contre mes fèves de l’an dernier avait déjà été cultivée en métissage et la vigueur des plus grands, qui culminent à plus de 2m50 est également une semi-surprise bien agréable.
- la phacélie dont j’ai semé 30m3 n’a pas aimé les conditions et seules quelques touffes ont levé. Mais je me suis rendu compte que les lentilles devaient entrer dans ce groupe-là alors j’ai semé deux planches de lentilles en bordure de la parcelle de phacélie, au cas où elle se décide. Une planche de 2 ou 3 m² en mélange multivariétal qui n’avait pas très bien marché l’an dernier, à cause de conditions difficiles entre la prédation des limaces et la compétition avec le rumex. Elle a beaucoup mieux fonctionné cette année, moyennant un resemi partiel après passage d’oiseaux gourmands qui avaient raflé une partie des poquets au stade « graine germée », le plus riche en vitamines. Oiseaux diététiciens et gourmets! Et assez futés pour picorer à travers les mailles du filet. Une autre planche d’une dizaine de m² en monovariété, des lentilles vertes du puys prélevées en cuisine en 2022 et cultivées depuis sur sol breton, avec une progression de la vigueur tout à fait intéressante. Cette année je vais pouvoir faire une évaluation de la production par m² et en déduire la surface et le travail qu’il faudrait fournir pour alimenter la cuisine collective à l’année. On ne tentera pas de couvrir la totalité des besoins, d’autant qu’il existe un producteur dans la commune voisine, mais savoir que ce ça prendrait m’intéresse.
- en bordure du carré de phacélie ratée, j’ai aussi casé 2m² de pois chiches métissés, également troqués pendant l’hiver contre certaines de mes semences. Je viens de découvrir les premières gousses formées, après une floraison qui m'a semblé interminable. D'autres pois chiches, prélevés en cuisine, que j’ai semés dans les 2 m² voisins n’ont absolument rien donné. Tout simplement pas de germination. C'est pas grave.
- Dans l’espace ainsi resté libre par les pois chiches non germés,, eux mêmes dans l'espace resté libre par la phacélie non germée, vous suivez toujours ? ... j’ai commencé une petite série de salades Carmen, avec les semences que Yann m’a données, issues de sa production, donc robustes. Je me découvre un plaisir particulier à cette culture en série, à renouveler tous les 15 jours, pour pas que les salades arrivent à la bonne taille toutes en même temps. Je voyais ça comme assez contraignant, mais j’ai simplifié par un semi direct avec éclaircissement au bout de 15 jours . Y’a juste un arrosoir à transporter tous les jours quand il ne pleut pas et comme je me déplace peu cette année, la contrainte s’intègre bien dans ma routine quotidienne.
- dans le reste de l'espace laissé libre par la phacélie, j'ai tenté de semer deux vieux sachets de lin trouvé au fond d'une boite de semences du collectif, mais il n'a pas germé. A retenter l'an prochain.
Dans ce groupe là, celui des cultures installées en hiver et récoltées en cours d’été, les membres du collectif se sont répartis quelques légumes, avec un-e pilote par légume :
- des patates précoces dont la récolte a commencé, montrant un joli rendement.
- des oignons jaunes et rouges qui ne vont pas tarder à jaunir
- 2m2 d’ail rose qui, lui, est déjà en train de piquer du nez. On le récoltera sans doute la semaine prochaine, si le temps sec se maintient.
La production de patates et d’ail est juste à visée d’apprentissage, tant les surfaces sont modestes, mais l’oignon, lui, risque d’être assez abondant pour nous contraindre mettre au point nos conditions de conservation. Je me vois déjà guider un atelier de tressage d’oignons avec les enfants du collectif. Et des tresses suspendues dans la grange…
Dans tout ça, je savoure ma propre aisance à jongler avec le développement ou l’échec de l’une ou l’autre culture pour improviser de nouveaux gestes de semi, tout en restant dans le cadre des groupes saisonniers. Il s’agit en effet de garder les bloc de cent m² a peu près synchrones pour pouvoir assurer l’alternance avec les couverts végétaux. J'en reparlerai.
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